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Les financiers achètent massivement des terres en Afrique

June 9, 2011

Originally published by Les Echos

09/06 | 16:40 | mis à jour le 10/06 à 10:54

Laurence Boisseau


 

Le cercle de réflexion Oakland Institute accuse les financiers de créer de la volatilité dans les prix et la production des produits agricoles en achetant des terres en Afrique.

 

La finance à nouveau aux bans des accusés. Hedge funds et fonds de pension contribuent à accroître la volatilité des prix sur les matières premières et créent de l'insécurité sur la production. Non pas en intervenant massivement sur les marchés financiers, mais en se portant acquéreur ou en louant de vastes étendues de terres en Afrique. 

Telle est la conclusion d'un rapport de l'Oakland Institute, un cercle de réflexion américain basé en Californie, qui a été publié mercredi 8 juin et qui s'inscrit dans un vase projet d'analyse des investissements réalisés en Afrique.

De grandes universités américaines seraient propriétaires terriens

En 2009, 60 millions d'hectares de terres en Afrique (soit l'équivalent de la superficie de la France) sont passés sous contrôle étranger contre moins de 4 millions d'hectares par an en moyenne avant 2008.

Même si de nombreuses compagnies indiennes ou chinoises se sont portées acquéreur de certaines de ces terres, ce sont surtout des compagnies occidentales de riches particuliers américains ou européens et des fonds d'investissement qui auraient des liens avec de grandes banques comme JP Morgan ou Goldman Sachs qui ont remporté la plus grande part du gâteau. 

Selon le rapport de l'Oakland Institute, de grandes universités américaines comme Harvard, Spelman, ou Vanderbilt, qui ont placé leur argent dans le fonds d'investissement anglais Emergent, seraient aussi propriétaires de certains de ces terrains.

Oakland Institute dénonce des conditions scandaleuses

Dans bien des cas, ces investissements ont été réalisés de manière totalement opaque, au détriment des populations locales qui sont chassées des terres qu'elles exploitaient, de l'environnement et de la stabilité politique des pays. 

Les nouveaux propriétaires remplacent les cultures traditionnelles par des cultures de rente, notamment pour la production de biocarburants ou de fleurs coupées. En réduisant l'offre, ces derniers ont ainsi un impact direct sur la production alimentaire dans le monde et sur ses prix. 

Le rapport insiste sur les conditions scandaleuses dans lesquelles certaines transactions sont négociées dans plusieurs pays africains (Ethiopie, Mali, Sierra Leone, Mozambique, Tanzanie et Soudan). « Certains investisseurs racontent qu'il est très facile d'acquérir une terre, qu'ils peuvent avoir généralement ce qu'ils veulent en donnant une bouteille de Johny Walker au chef de tribu et en lui promettant des emplois et du progrès, promesses qui ne sont pas tenues » s'indigne Anuradha Mittal, directeur d'Oakland Institute. 

Souvent, les terres sont concédées pour de longues périodes pouvant aller jusqu'à 99 ans.  Elles sont gratuites au Mali, ou très peu chères ailleurs. Au Sierra Leone, un hectare coûte 2 dollars par an ; en Ethiopie, 6,75 dollars alors qu'au Brésil et en Argentine, il faut verser entre 5.000 et 6.000 dollars par hectare.  

L.BOI.